Le travail c’est la santé. Ce n’est certainement pas le plus grand serviteur de Louis XIV qui dirait le contraire. Mort à 73 ans en 1707, Vauban a travaillé toute sa vie pour rester un maître incontesté et incontestable. Il n’a jamais cessé de cultiver l’excellence, pour rester libre. Une belle leçon (d’histoire et de d’humilité) pour tous les innovateurs.
Le contenu que vous allez lire est le fruit d’une conversation approfondie avec Christian Monjou, professeur agrégé et conférencier, intervenant auprès de décideurs sur les questions de pouvoir, de leadership, d’innovation et de sens.
Le courage
L’excellence de Vauban lui donne une légitimité d’expression qu’il sait utiliser à bon escient dans son domaine d’expertise. C’est un serviteur et un contradicteur qui s’autorise à défendre ses idées, pas un courtisan. Il est totalement aligné sur l’objectif qu’on lui a assigné (le WHY de Louis XIV qui a décidé d’enfermer la France dans des fortifications) mais il sait garder une marge de manoeuvre certaine dans l’exécution, une liberté d’action souvent salvatrice (le HOW et le WHAT).
L’ouverture et la diversité
Vauban a la conviction profonde que seule l’ouverture et la diversité permettent à un groupe d’individus (en l’occurrence un Royaume) de se renouveler, de grandir, de ne pas s’appauvrir ni s’assécher. Il sera un de ceux, au péril de sa vie, à critiquer ouvertement la révocation de l’édit de Nantes (1685), édit de tolérance et d’ouverture envers les protestants, promulgué en 1598 par Henri IV.
L’exploration
Vauban est un des plus grands explorateurs de son temps. Il refusait les jeux de couloir du système, clairvoyant sur les dangers de l’enfermement. Il aurait parcouru plus de 18.500 km à cheval ou tracté par des chevaux dans sa vie (on dirait mobilité professionnelle aujourd’hui). Il est celui qui connait le mieux le royaume de France, celui qui est allé l’observer par lui même dans ses moindres recoins.
La réinvention
L’oeuvre de Vauban est une série, une variation autour d’un thème, un travail permanent sur le même et la différence. Chaque fortification est avant tout et fonctionnellement une fortification, mais chaque édifice est unique, pensé et ancré dans son territoire. Il n’y a pas pour Vauban de solution universelle, il ne copie-colle pas, il travaille autant le problème que la solution. Son travail est une immersion, une observation fine des spécificités de chaque entreprise, une absolue localisation. Une pensée radicalement inductive dans un monde cartésien.
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- Trois livres pour aller plus loin : Vauban de Bernard Pujo, Vauban hors les murs ou la mauvaise conscience du Roi d’Alain Monod, Vauban 1633-1707 un militaire très civil de Guillaume Monsaingeon
- Les fortifications de Vauban sont inscrite depuis 2008 sur le liste du patrimoine mondial de l’UNESCO
- L’oeuvre sérielle de Vauban n’est pas sans rappeler celle des plus grands bâtisseurs contemporains comme Frank Gehry et Tadao Ando
- Lorsque nous sommes confrontés à un problème nous pensons tout de suite à une solution alors que nous devrions passer le temps nécessaire à mieux comprendre les enjeux et la nature même du problème (When You’re Innovating Resist Looking for Solutions, Harvard Business Review)